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Introduction
En général, le bonheur est associé à un état total de satisfaction personnelle propre à tout être humain. Cependant, le bonheur influence nos actions.
Dans la société actuelle, le droit assure à l’individu d’utiliser librement son corps et non de le protéger comme auparavant. Le risque de dérive est bel et bien réel, notamment dans le cadre de l’euthanasie comme nous allons le voir. En effet, il importe de veiller à la liberté et à la lucidité de la prise d’une telle décision pour éviter de choisir en dépit de la volonté du patient, de convenir avec précipitation de ce qui devrait contribuer au bonheur d’autrui.
Dès lors, pratiquer l’euthanasie, est-ce faire le bonheur d’autrui malgré lui-même, même si c’est dans le but de le soulager de ses souffrances, de lui permettre de mettre fin à sa vie dans la dignité?
Dans cette perspective, nous évoquerons dans une première partie la question de la dignité selon la pensée de Kant. Nous poursuivrons ce face à face entre la quête du bonheur et l’euthanasie avec l’idéal libéral de l’éthique utilitariste et la pensée de Mill. Avant de conclure, nous aborderons la liberté de disposer de son corps sans faire fi de la dignité humaine selon l’individualisme libertarien de Nozick.
I. La conception déontologique kantienne
Au préalable, selon Kant, la dignité humaine constitue une valeur absolue qui caractérise autant l’individu que son corps. Cela signifie qu’il n’est pas moral de mettre fin à la vie de quelqu’un quel que soit la raison, à sa demande ou non. La dignité ne relève pas de l’être humain.
Dès lors, les actions influencées par une quelconque quête du bonheur découlent davantage de la liberté dans les choix effectués.
Par exemple, dans la pensée du philosophe, le fait d’amputer un membre du corps d’autrui ne représente pas une atteinte à sa dignité. Il convient néanmoins que l’acte soit pensé dans le bien d’autrui. Une personne atteinte d’une maladie incurable, d’un handicap sévère affectant extrêmement son quotidien est aussi digne qu’une autre en bonne santé. La conception déontologique de Kant proscrirait l’euthanasie vu que selon elle la vie humaine est dotée d’une dignité telle qu’aucun individu ne peut en être dépourvue.
Si la théorie de Kant en a inspiré d’autres, elle est tout de même quelque peu dépassée vu l’évolution du contexte sociétal, avec la régression de l’idéologie chrétienne entre autres.
C’est pourquoi, à l’opposé de la pensée de Kant, certains considèrent l’euthanasie comme moralement acceptable. Il importe de conserver un souci de préservation de l’abus, d’erreurs de jugement.
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II. L’idéal libéral de l’éthique utilitariste
Ensuite, si nous portons notre attention sur la question du bonheur dans la conception utilitariste, il s’agit de prendre en considération les conséquences, les effets sur la famille, les coûts engendrés pour la société. C’est le plus grand bonheur pour le plus grand nombre qui prime. La douleur et le plaisir régissent les actions des êtres humains. Or, il demeure important de ne pas confondre le bonheur, davantage un idéal, avec le plaisir. Ils diffèrent tous les deux par leur intensité et leur durée.
Par exemple, un malade en phase terminale, dans son propre intérêt, a le droit de solliciter une euthanasie. Cependant, il n’est plus question de lui nuire s’il n’est plus apte à penser de manière rationnelle. Cette conception utilitariste permet ainsi de pratiquer l’euthanasie de diverses façons, c’est-à-dire dépourvue de toute volonté, indirecte, passive, entre autres…
Si Kant considère l’autonomie de l’être humain comme une autolimitation, Mill, quant à lui, l’envisage davantage comme une indépendance absolue. La pratique de l’euthanasie, basée sur l’éthique utilitariste, plutôt normative, restreint ainsi l’être humain à un objet. Elle se trouve ainsi dénuée de tout fondement du bonheur puisqu’un bon acte est celui qui a de bonnes conséquences. En effet, Mill considère la vertu, c’est-à-dire la maximisation du bien-être, en tant que moyen de bonheur et ensuite comme fin de soi.
III. L’individualisme libertarien de Nozick
Enfin, Robert Nozick revendique quant lui la liberté individuelle, le droit de posséder et de décider librement pour tout être humain sur ce qui lui appartient. Il convient de limiter les contraintes sociales imposées par la dimension politique en faveur du libre choix de chacun. Quel que soit le contexte, la pensée du libertarianisme de Nozick justifie l’euthanasie. Les motivations qui ont conduit à une telle décision sont ignorées. La théorie de Nozick ne s’éloigne pas du concept de dignité humaine chez Kant mais se veut plus radicale que l’utilitarisme de Mill sur l’aspect libéral.
Par conséquent, dans la conception libertarienne du philosophe, la possession de quelque chose s’accompagne du droit de conserver, d’exploiter, de détruire,… cette chose. Lorsque ce raisonnement se rapporte à notre corps, le risque de dérive existe réellement, surtout à l’égard des plus vulnérables.
Par exemple, tout individu possède la liberté de solliciter l’euthanasie et de pouvoir la pratiquer avec l’assistance d’une tierce personne vu que c’est sa volonté. Il s’agit de la position actuelle de la Cour européenne des droits de l’homme.
Mais, aujourd’hui, la protection de la vie et de la dignité humaine ainsi que des plus vulnérables restent privilégiés au respect de l’autonomie personnelle. L’avenir de l’autonomie corporelle demeure donc incertain. En effet, il convient d’éviter des décisions hâtives et irrationnelles.
Conclusion
En conclusion, il est impossible de faire le bonheur d’autrui malgré lui comme constaté avec l’euthanasie au travers des conceptions philosophiques de Kant, de l’utilitarisme de Mill et de l’individualisme libertarien de Nozick.
Cela s’explique par le nécessaire respect de la dignité humaine absolue revendiqué par Kant, par l’utilitarisme de Mill qui fait du bonheur un objet source de bien-être et non un idéal ainsi que par le manque de gardes fous dans le libertarianisme de Nozick.
Dans notre société, la protection de la vie et de la sécurité des personnes doit être exercée dans le respect de la volonté et de l’autonomie personnelle de chacun au détriment de la quête du bonheur absolu. La décision de pratiquer l’euthanasie ne mène pas au bonheur, mais probablement vers un soulagement, un bien-être.
C’est pourquoi, le droit de disposer de son corps, reconnu et consacré par la Cour européenne des droits de l’homme, suscite toujours de nombreuses interrogations quant à son exercice effectif, ses conséquences et ses éventuelles limites.
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