Cette œuvre reproche l’encadrement inflexible et doctrinaire des enfants, mais également les pratiques abusives des dirigeants ecclésiastiques et politiques. Dans cet article, nous allons examiner ce chapitre en insistant sur ses questionnements, son style littéraire, et ses enseignements.
La cadre du chapitre 23
Dans ce chapitre, le jeune géant débute son apprentissage sous la direction de nombreux mentors. L’enseignement qu’il reçoit fait l’objet de critiques de l’auteur, qui s’oppose ici aux systèmes éducatifs de son ère. À travers le personnage de Gargantua, Rabelais dénonce une pédagogie qui favorise l’apprentissage par cœur et la soumission, au préjudice de la pensée libre et rationnelle. Ce chapitre est une critique acerbe des méthodes d’enseignement sévères et strictes, mais aussi des organismes religieux et politiques qui pèsent sur ces pratiques.
Le jugement sur les institutions et les pratiques éducatives
Ce chapitre de Gargantua représente un assaut direct contre le système éducatif classique du 16e siècle. D’après François Rabelais, les enseignants d’autrefois accordent plus d’importance aux règles et au pouvoir qu’au progrès intellectuel ou à la maturation de l’esprit des enfants. Gargantua, malgré le fait qu’il soit un géant, est considéré comme un jeune sous l’influence d’une éducation qu’il ne capte pas. L’un des aspects fondamentaux du jugement de Rabelais demeure dans la manière dont l’enseignement est détaché des fondements de la pensée rationnelle.
Autrefois, les institutions scolaires priment la mémorisation sans réflexion, ce qui bloque les élèves dans la capacité de discernement et le développement de la pensée rationnelle. Plutôt que d’apprendre à raisonner, on leur exige un mémoire mécanique ou une acquisition superficielle. En effet, cette méthode d’enseignement, sans imagination et esprit d’initiative, est ouvertement critiquée par François Rabelais. Dans son roman, Gargantua est fréquemment soumis à des apprentissages insignifiants et absurdes qui l’empêchent de se cultiver ou d’évoluer sur plan intellectuel.
La valorisation de la réflexion critique et de l’autonomie
En dehors de la remise en question des pratiques pédagogiques, Rabelais met en valeur le sens de l’analyse et la pensée indépendante. Gargantua, innocent et crédule, manifeste dès le commencement de sa formation qu’il ait un esprit libre et critique. Il ne se réduit pas à suivre seulement des formations ; il essaye de comprendre et d’examiner les leçons qu’on lui transmet. Ce comportement fait référence à l’idéologie centrée sur l’humain qui, dans le contexte de la Renaissance,exploitait le raisonnement et la liberté personnelle vis-à-vis des autorités.
L’auteur pousse ses lecteurs à prendre une attitude critique face à l’enseignement et la société. Le personnage de Gargantua symbolise l’éthique de l’humanité d’une personne libre, prêt à penser de façon autonome et reconsidérer les doctrines instaurées par les organismes. Rabelais désapprouve le concept d’un enseignement rigoureux et doctrinaire, et défend le style pédagogique plus flexible, basé sur la soif de savoir, l’étude et la compréhension.
La critique des autorités religieuses et gouvernementales
Le chapitre 23 ne se limite pas à une simple contestation de l’éducation traditionnelle ; il remet en cause les autorités religieuses et gouvernementales qui manipulent l’enseignement et la société de l’époque. En décrivant la manière dont les instituteurs exercent une domination inappropriée et imposent des connaissances sans intérêt, l’auteur blâme de façon indirecte l’influence de la religion et le gouvernement dans l’apprentissage des adolescents. En réalité, ces institutions étaient, en permanence, présentes dans l’existence des individus et décidaient de ce qui était correct ou pas, sans ouvrir la voie à la réflexion.
L’auteur utilise Gargantua pour dévoiler l’obéissance totale aux doctrines religieuses et aux pouvoirs établis. Il reproche à l’enseignement d’être un facteur de stabilité sociale et de perpétuation des idéologies, où l’on exige aux gens des valeurs qui brident leur capacité de réflexion. De ce fait, il amène à douter des dominations institutionnelles et invite à une liberté accrue de réflexion et d’opinion.
Le ton et les techniques d’écriture
L’un des éléments les plus remarquables de cette œuvre de Rabelais correspond à la pratique du style satirique et du sarcasme. Il emploie une langue expressive et frappante pour se moquer des autorités qu’il reproche. Dans ce chapitre, il utilise l’humour et l’exagération pour railler les approches pédagogiques ainsi que les figures d’autorité. Les mentors, qui se targuent d’enseigner Gargantua, sont perçus comme des personnalités grotesques, complètement insensées.
La dérision ou la caricature est également au cœur de la critique. L’auteur imite des supports pédagogiques ainsi que les prêches religieux afin de ridiculiser leur inconscience et leur futilité. En caricaturant les styles littéraires classiques tout en les humiliant, l’auteur dénonce les normes qu’ils symbolisent et suggère un système éducatif non conventionnel. Le ton, à la fois comique et abusif, de Rabelais provoque une réaction choquante chez le lecteur et le pousse à méditer sur les questions qu’il soulève. Le mode d’expression, généralement démesuré et hyperbolique, est un moyen de déclencher un moment de réflexion ou un déclic chez le lecteur. Et cela, en l’encourageant à ne pas considérer les structures établies et les valeurs de son temps comme absolues.
Conclusion
Dans Gargantua, le chapitre 23 est une dérision cinglante de l’enseignement, de l’Église et des dirigeants gouvernementaux du 16e siècle. Grâce au personnage de Gargantua, François Rabelais dénigre les pratiques éducatives répressives et doctrinaires, qui obstruent le développement de leur pensée critique et leur émancipation. Il met en évidence le besoin d’un enseignement basé sur l’autonomie, la pensée et l’indépendance de l’individu.
Hormis la contestation des systèmes institutionnels, ce chapitre illustre les valeurs humanistes de l’ère de la Renaissance, qui favorise la pensée autonome et la critique des doctrines. Gargantua, en s’opposant à la soumission d’une instruction déraisonnable, devient un exemple de personne indépendante et réfléchie, apte à développer sa propre connaissance et à contester le pouvoir établi. L’auteur convie donc ses lecteurs à méditer sur l’impact de l’enseignement dans l’épanouissement personnel et sur la façon dont les autorités forment l’esprit et la société.
Pour finir, l’histoire de Gargantua dans le chapitre 23 attire notre attention sur l’importance de l’autonomie de l’esprit et de l’analyse critique ; des valeurs encore adaptées à l’environnement actuel.