La philosophe et sociologue française Dominique MÉDA estime que “Ce n'est pas parce que notre État, nos services publics, nos administrations présentent des défauts qu'il faut remettre en question le concept même de service public.” En effet, le service public est central aussi bien en droit administratif que dans la vie quotidienne des citoyens.
Selon la définition juridique classique de Léon DUGUIT, le service public renvoie à “toute activité dont l'accomplissement doit être assuré, réglé et contrôlé par les gouvernants, parce que cet accomplissement est indispensable à la réalisation et au développement de l'interdépendance sociale”. Il ajoute que sa nature ne permet pas à la seule force gouvernante d’intervenir. Louis Rolland, dans les années 1930 a énoncé les lois qui gouvernent le service public : le principe de continuité du service public, celui de mutabilité du service public et enfin celui de l’égalité du service public. En outre, le service administratif comprend trois principaux critères : le critère matériel (l'activité doit avoir un but et un contenu à caractère d’intérêt public), organique (le service public doit être rattaché à une personne publique) et fonctionnel (un fonctionnement suivant les règles édictées par la jurisprudence).
Lorsqu’un service est qualifié de service public, il peut être rangé dans la catégorie des services publics administratifs (SPA) ou des services publics industriels et commerciaux (SPIC). Alors que les premiers sont soumis à une gestion privée, les second sont quant à eux, soumis à une gestion publique. La qualification peut être soit textuelle soit jurisprudentielle. Dans ce dernier cas, ce sont les arrêts Union syndicale des industries aéronautiques (CE ass. 16 novembre 1956) et Dame Maron (CE section, 26 janvier 1968) qui ont fixé les éléments de distinction.
S’intéresser aux services publics administratifs et subsidiairement aux services publics industriels et commerciaux a tout son intérêt dans la mesure où les enjeux sont importants. En effet, depuis sa célèbre décision Bac d’Eloka rendue le 22 janvier 1921 concrétisant la dichotomie, le Tribunal des conflits ne cesse d’être saisi quant à la division entre les services publics. Cela met alors en avant la complexité du découpage tant pour le public concerné, pour les citoyens que pour l’Administration. Le Tribunal des conflits a notamment pu apporter des précisions quant au statut des agents des SPIC dans un arrêt Compagnie Air France contre les époux Barbier en date du 15 janvier 1968 ou encore dans un arrêt Abadie daté du 17 avril 1959. Ce dernier concernait les établissements publics à double visage. En termes de portée de la distinction, bien qu’elle détermine le droit applicable, la distinction entre les SPA et les SPIC tend à se relativiser.
Ainsi, la question qui se pose en l’espèce est la suivante : Les services publics administratifs, sont-ils les seuls véritables services publics ? Bien qu’à l’heure actuelle la dichotomie est totale et encadrée, il semblerait que l’érosion de la distinction entre les deux services publics soit visible. Ainsi, pour répondre à l'interrogation, il convient de se pencher dans un premier temps sur la présence d’une dualité certaine entre les SPA et les SPIC (II), avant de se pencher dans un second temps sur une érosion visible entre ces deux catégories de services publics (II).
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I- Une dualité certaine, distinctive entre les SPA et les SPIC
Les services publics se divisent en deux catégories : les SPA d’une part et les SPIC d’autre part. Cette division est établie sur des critères et des méthodes utilisés par le juge administratif (A). Cette dualité reflète la diversité des besoins d’intérêt général (B).
A- Des critères liés à des méthodes de distinction bien établis par le juge administratif
Pour différencier les SPA des SPIC, le juge administratif utilise des critères et des méthodes établies.
La qualification peut être textuelle et relever du législateur. Dans ce cas, le juge est tenu par celle-ci. Toutefois, lorsque la qualification émane du pouvoir réglementaire, le juge a son rôle à jouer dans la mesure où le service public lui-même ne fait pas l’objet de la qualification, c’est plutôt une qualification de l’organisme gérant le service public. Par exemple, dans l’arrêt rendu par le Tribunal des conflits, Abadie, le 17 avril 1959, les juges ont dû se pencher sur les établissements publics à double visage.
La qualification peut en outre être jurisprudentielle et découle de l’arrêt Union syndicale des industries aéronautiques rendu par le Conseil d’État réuni en assemblée le 16 novembre 1956. Cet arrêt pose une présomption d'administrativité, une présomption de service public administratif. Par exception, le service public peut être qualifié de SPIC si trois conditions cumulatives sont réunies : l’objet du service, l’origine des ressources ainsi que les modalités de fonctionnement. Le juge utilise alors la méthode dite du faisceau d’indices. Avant cette décision, l’arrêt Bac d’Eloka de 1921 a permis au Commissaire du Gouvernement Matter de proposer une doctrine, la doctrine Matter et d’amener une distinction entre les activités publiques : celles relevant des fonctions régaliennes de l’État et les activités entreprises à titre privé exercées accidentellement par l’État.
Ainsi, les critères utilisés par le juge administratif sont bien définis et établis de longue date. Ils permettent véritablement de distinguer le SPIC du SPA.
L’existence d’une dualité entre le SPIC et le SPA met également en lumière la diversité des besoins d’intérêt général.
B- Une dualité reflétant la diversité des besoins d’intérêt général
La présence de deux sortes de services publics, les SPA et les SPIC illustre la diversité des besoins d’intérêt général. Cette dernière notion renvoie soit au champ de l'action publique, soit aux valeurs sociales collectives. L’intérêt général est une norme constitutionnelle.
Le juge administratif distingue en effet les SPA et les SPIC en fonction des missions qui sont assurées par les services publics et qui répondent à des besoins divers et variés de la société toute entière. Le service public administratif est tourné vers des fonctions régaliennes de l’État (la sécurité ou encore la justice - TC, 27 novembre 1952, Préfet de Guyane) ou d’intérêt général non lucratif (l’éducation par exemple) : il nécessite la gestion par des personnes publiques et repose sur des règles du droit administratif. Le service public industriel et commercial diverge. Il poursuit également des missions de service public mais il est quant à lui orienté vers des activités économiques de nature privée. Leur but est de répondre aux besoins quotidiens de la population, des citoyens. Cela peut concerner les transports publics ou encore la distribution de l’eau. Il y a ici une notion de rentabilité. Il a par exemple été jugé par le Tribunal des conflits que les associations syndicales autorisées sont des établissements publics (TC, 9 décembre 1899, Association syndicale du Canale de Gignac).
On ne peut dire que seuls les SPA sont des véritables services publics dans la mesure où la dualité SPA/SPIC met en avant l'adaptation nécessaire de l’Administration aux exigences à la fois pratiques et économiques. Dans la même lignée, elle doit garantir l’accessibilité et la continuité des services publics. Finalement, les finalités et les enjeux de ces deux services publics varient de sorte qu’ils sont essentiels chacun pour ce qu’ils sont.
Les besoins d’intérêt général étant pluriels, une dualité des services publics est utile pour gérer de manière personnalisée chacun d’eux.
Bien qu’il existe une réelle dualité entre les SPA et les SPIC, que des critères ont été définis, l'érosion de la distinction est également visible depuis quelque temps.
II- Une érosion visible de la distinction entre les SPA et les SPIC : une distinction qui tend à s’effacer
La distinction tend de plus en plus à s’effacer entre les SPA et les SPIC. En effet, en raison d’une certaine ambiguïté théorique, l’incertitude devient également pratique (A). Ainsi, une évolution vers le monisme du SPA semble envisageable (B).
A- Une ambiguïté théorique menant à une incertitude pratique
Certains auteurs ont mis en avant la présence d’une ambiguïté théorique. Cette dernière a nécessairement des impacts dans la pratique.
Le droit est régi par le principe de clarté, de sécurité juridique. Or, dès ses débuts, la notion de service public à gestion privée a été contestée. Elle continue de l’être. Cela semble logique, le droit privé ne pourrait intervenir dans un service public qui par nature est géré par le droit administratif, par le droit public. A défaut, on risque de “tomber dans la confusion et l’erreur” selon Léon DUGUIT. Cette analyse est également présentée par Gaston JÈZE dans sa note relative à l'arrêt rendu par le Tribunal des conflits, le 11 juillet 1933, Dame Mélinette. s’agit là d’une ambiguïté théorique. Enfin, Pierre SANDEVOIR a qualifié le service public industriel et commercial d’”authentique contradiction”. Cette ambiguïté est amplifiée par le fait qu’il a fallu attendre plus de 30 ans avant que les critères des deux services publics soient enfin arrêtés. Ces critères restent encore pour certains d’une médiocre fiabilité d’où les errances jurisprudentielles. Quoi qu’il en soit, cette ambiguïté théorique a nécessairement des conséquences dans la pratique. La pratique est incertaine. En effet, des questions restent en suspens quant au caractère du service public géré : le service est-il géré par une personne privée ou publique ? Dans le cas où un acte unilatéral serait à l’origine du litige, serait-il qualifié d’acte de droit privé ou d’acte administratif ? Outre ces questions, des hésitations et divergences interviennent quant à la qualification même de service public (CE, 4 juillet 1986, Berger par exemple).
L'ambiguïté de la notion même de service public industriel et commercial mène à des errances, des questionnements, des incertitudes pratiques.
En raison de cette ambiguïté et de cette incertitude contraire aux principes directeurs du droit, une évolution vers le monisme du SPA est envisageable.
B- Une évolution vers le monisme du SPA envisageable
Une évolution vers le service public administratif comme seul et unique service public est envisageable.
D'emblée, cette suppression de la dualité des services publics aurait le mérite de la simplicité. Les récentes réformes en droit vont toutes dans ce sens : la simplicité. En effet, le droit est bien trop complexe pour le justiciable lambda et il le devient pour les professionnels du droit qui se posent eux même de nombreuses questions notamment eu égard à la multiplication des normes.
De plus, la conservation du seul service public administratif éviterait un engorgement des juridictions administratives. Il est à noter que pour la première moitié de l’année 2024, un tiers des saisines du Tribunal des conflits concernait la distinction entre le SPIC et le SPA. En ce sens, elle a par exemple rendu, le 17 juin 2024, les décisions M. et Mme A… c/ Commune de Changé et autre ou encore Mme A… et M. B… c/ Communauté urbaine Le Havre Seine Métropole. Dans la pratique, la distinction entre le service public administratif et le service public industriel et commercial est dépassée. Cette distinction est ignorée dans la lignée de l’effacement de la frontière entre le droit privé d’une part et le droit public d’autre part.
Pour une raison de simplicité et de remise en question de certains pans du droit administratif, l’évolution vers le monisme du SPA est envisagée, conduisant à la suppression de la dualité SPA/SPIC.
Pour cette dissertation de droit administratif, une variation du plan peut être proposée comme suit
I- Une dualité certaine entre les SPA et les SPIC
A- Des critères et méthodes de distinctions bien établis
B- Une dualité conforme au dualisme juridictionnel et au principe de la séparation des pouvoirs
II- Une érosion visible de la distinction entre les SPA et les SPIC
A- Une ambiguïté théorique menant à une incertitude pratique
B- Une évolution vers le monisme du SPA envisageable
Méthodologie suivie pour cet exemple de dissertation corrigée en droit administratif
La méthodologie de la dissertation juridique est étudiée dès la première année de droit. Elle est ensuite utilisée pendant pendant tout le cursus droit. C'est un exercice classique imposé par les professeurs de droit et chargés de TD.
L'introduction de la dissertation juridique
L'introduction est, avec le plan et la problématique choisis, l'élément le plus important de la dissertation. Elle doit contenir des jurisprudences et inclut :
- Accroche : habituellement une citation ou une phrase d'accroche qui attire l'attention du correcteur
- Annonce du sujet : définition et délimitation : penser à un effet "entonnoir" c'est à dire commencer par définir un terme général pour aller vers un définition plus précise
- Intérêt du sujet : cette étape est importante. Elle permet d'amener la problématique. Il s'agit ici d'exposer en quoi le traitement du sujet présente un intérêt juridique : pourquoi il est nécessaire de se poser cette question et d'y répondre. Il est donc important de trouver un intérêt qui se rattache à votre problématique. Cette étape vous permet de passer de la présentation globale de votre sujet à votre problématique, qui ne porte que sur un aspect précis de celui-ci. Elle vous impose de prouver au correcteur que vous vous êtes réellement interrogé sur le sujet et que vous ne vous apprêtez pas à dérouler vos connaissances dessus.
- Problématique : c'est la question à laquelle vous répondrez avec votre dissertation
- Annonce du plan : elle renvoie à la façon dont vous mènerez la démonstration et permet d'exposer la direction prise, de sorte que votre argumentation transparaisse clairement.
Le développement : il doit comporter des jurisprudence dans chaque sous partie afin de justifier l'idée
Le développement d'une dissertation juridique se fait habituellement en suivant un plan en deux parties et deux sous-parties. Débutez toujours votre paragraphe par ce que vous entendez démontrer. En une phrase simple, exposez l'argument de votre sous-partie et abordez ensuite les éléments qui le soutiennent. Ainsi, le correcteur vous lira en sachant où vous souhaitez en venir, ce qui simplifiera sa lecture et vous rendra plus clair. Par ailleurs, vous imposer cette étape vous permettra de vous cadrer et d'apporter les exemples et connaissances strictement nécessaires à votre démonstration. Ainsi, vous ne tomberez pas dans le piège de l'étalage de connaissances.
Votre raisonnement doit être clair et apparent. Sautez une ligne lorsque vous avez achevé une étape de votre démonstration. Vous devez utiliser des arguments juridiques. Pour cela, il faut apprendre son cours et l'utiliser sans le réciter. Les jurisprudences vues en cours et en TD sont des illustrations nécessaires. Vous devez les apprendre par coeur (nom et année) et les mobiliser habilement.
À la fin de votre paragraphe, résumez en une ligne l'idée que vous venez de démontrer et rattachez cette idée à votre démonstration globale. À partir de là vous pouvez bâtir la phrase de transition.
En suivant cette méthodologie classique, vous ne pourrez qu'obtenir de bonnes notes à vos dissertations. Si besoin, vous pouvez vous faire aider par un tuteur MyStudies pour vous lancer, en demandant un accompagnement à la mise en place de la problématique et du plan détaillé, par exemple, ou pour faire relire et corriger votre dissertation juridique par un tuteur (humain ! Évidemment, l'utilisation d'une IA en droit est fortement déconseillée. Hallucinations telles qu'invention de lois et arrêts ne vous permettront pas de tromper votre correcteur).