Définition et enjeux d’un mémoire en sciences humaines

Le mémoire est la conclusion des années universitaires des étudiants. Il s’agit d’un exercice poussant l’étudiant à développer une réflexion critique sur un sujet donné, en lien avec des problématiques sociales, culturelles ou historiques. Il utilise alors toutes les compétences qu’il a développé durant ces années en licence et en master. 

Du fait de la pluridisciplinarité des sciences humaines, la rédaction du mémoire apparaît comme un exercice très stimulant. En effet, les objets d’étude y sont souvent relativement complexes et nécessitent un cadre théorique dense. L’enjeu central est alors de proposer une analyse originale tout en respectant la rigueur attendue dans une démarche scientifique. 

 

L’importance du cadre théorique en sciences humaines

Un socle conceptuel pour interpréter le réel

Dans les sciences humaines, la théorie est très importante. En effet, elle offre la grille de lecture qui va permettre de comprendre, d’expliquer puis d’interpréter des phénomènes sociaux et/ou culturels. Qu’il s’agisse de la sociologie de Pierre Bourdieu ou de celle de Bernard Lahire ou de l’anthropologie de Claude Lévi-Strauss, chaque courant propose des concepts précis qu’il faut maîtriser pour organiser sa réflexion.

Grâce au mémoire, vous devez donc mettre en avant la manière dont vous vous positionnez par rapport à un corpus théorique existant. Il ne s’agit pas uniquement de restituer des idées. L’intérêt est d’articuler des références pour fonder votre problématique tout en développant votre interprétation personnelle. Dans un sens, nous pouvons dire que la problématique est une boussole qui vous permet d’orienter la question de recherche, le choix des données et la méthode d’analyse.

La pluralité des références

Dans les sciences humaines, il y a une grande variété de paradigmes. Nous pouvons parler du positivisme, du structuralisme, du constructivisme ou de l’approche phénoménologique par exemple. Chacun des paradigmes propose des concepts-clés et une vision particulière de l’objet étudié. De là, le mémoire que vous proposez doit forcément se baser le croisement de différents regards sur un phénomène donné. La pluralité théorique attendue entraine alors une excellente maîtrise bibliographique. Il faut donc lire des articles scientifiques et des ouvrages de référence. Une fois que vous aurez fait cette revue de littérature, il faudra hiérarchiser et sélectionner les approches les plus pertinentes pour répondre à la problématique. Celle-ci découle d’ailleurs de vos lectures.

Les méthodes de recherche : entre qualitatif et quantitatif

La prépondérance de la méthode qualitative

Dans la forte majorité des cas, les mémoires en sciences humaines développent surtout une réflexion sur les méthodes qualitatives. Que ce soit par des entretiens semi-directifs, des observations participantes, des analyses de textes ou d’archives ou des focus groups, il existe différentes techniques qui permettent de saisir la richesse et la complexité du réel.

L’objectif de la recherche en elle-même est de mener au recueil de données empiriques qui s’inscrivent dans un contexte particulier. 


L’apport du quantitatif

Il existe tout de même de plus en plus de mémoires en sciences humaines qui incluent des aspects quantitatifs. Par exemple, un questionnaire diffusé en ligne peut permettre de sonder un échantillon plus large et d’obtenir des statistiques. Cette approche mixte (qualitative et quantitative) peut offrir un angle de réflexion en plus. En effet, le quantitatif aide à mesurer l’ampleur d’un phénomène, alors que le qualitatif permet d’en comprendre la signification et les mécanismes sous-jacents.

 

L’analyse et la critique des sources

Diversifier les sources pour une meilleure fiabilité

En sciences humaines, un mémoire repose sur différentes sources possibles. Il peut y avoir les données d’archives, les articles scientifiques, des entretiens ou des observations. Cette diversité permet d’enrichir l’argumentation, à condition de respecter une cohérence globale. A chaque fois, il faut être très attentif à définir l’origine des sources que ce soit le contexte de production, l’auteur ou la date. Il faut aussi expliquer dans les conditions dans lesquelles vous avez collectés vos données. Enfin, il faut que vos sources soient pertinentes avec votre question de recherche. 

 

La place de la démarche critique

Il s’agit d’une des choses qui sera évaluée dans votre mémoire. Toutes les sources doivent être critiquée au regard de son contexte d’élaboration et des éventuels biais qu’elle véhicule. Durkheim (1895) insistait déjà sur l’importance de s’interroger sur les conditions de validité d’un fait social. De là, il convient de se poser un certain nombre de questions comme en s’interrogeant sur les limites d’un témoignage direct. Mais aussi sur les catégories d’analyse employées. Enfin, il faut aussi toujours se rappeler que le chercheur doit éviter d’être subjectif dans la récolte et l’interprétation des données. C’est grâce à cette réflexion critique que les sciences humaines bénéficient d’une dimension réflexive. En effet, le chercheur prend conscience de sa position dans le processus et l’impact que celle-ci peut avoir sur l’interprétation des résultats.

 

Conclusion

La rédaction d’un mémoire en sciences humaines se caractérise par plusieurs spécificités comme la pluralité des cadres théoriques et des approches méthodologiques, mais aussi une analyse critique approfondie des sources et des données,

En définitive, ce travail requiert un équilibre entre la créativité, visible à la fois dans le choix du sujet, mais aussi dans la formulation des hypothèses et dans l’interprétation des données) et la discipline scientifique (respect de la méthodologie, justification des choix, transparence sur la posture du chercheur). Pour l’étudiant, c’est un exercice formateur qui l’initie aux exigences de la recherche tout en lui permettant de développer une réflexion personnelle sur des problématiques souvent au cœur de la société. Réaliser un mémoire en sciences humaines, c’est finalement prendre part à un dialogue continu avec des générations de penseurs, de chercheurs et d’acteurs sociaux qui, tous, tentent de mieux comprendre l’être humain et ses multiples expressions culturelles.

 

Bibliographie : 

  1. Eco, U. (1977). Comment faire une thèse. Bologne : Bompiani.

  2. Becker, H. (1986). Writing for Social Scientists: How to Start and Finish Your Thesis, Book, or ArticleThe University of Chicago Press.

  3. Bourdieu, P. (1972). Esquisse d’une théorie de la pratique. Genève : Droz.

  4. Durkheim, E. (1895). Les règles de la méthode sociologique. Paris : Félix Alcan.

  5. Quivy, R. & Van Campenhoudt, L. (2006). Manuel de recherche en sciences sociales (4e éd.). Dunod.